Gigfy avait parcouru en toute hâte le chemin qui séparait Alençon d'Angers : enfin il allait dans la ville de son coeur. Il avait dû oeuvrer pendant de longues semaines pour obtenir le poste convoité : le Chancelier était particulièrement sévère avec les postes importants de la diplomatie, et l'administration restait la même que partout ailleurs : régulièrement sujette à quelques petits ratés et autres retards ou égarement de dossiers. Mais enfin il avait reçu sa lettre d'accréditation scellée par la duchesse. Il était parti sur l'heure, ayant tout de même la présence d'esprit d'emporter une tenue convenable en remplacement de celle qui serait probablement abîmée par les aléas de la route.
Les étapes du Mans et de La Flèche furent vites avalées et l'arrivée en la cité du bon Roi René sous les étoiles, la Lune se reflétant superbement dans la Maine, l'avait ravi. Il prit le temps de se changer et, malgré l'heure tardive, se présenta au château. Il franchit le pont-levis en se promettant d'aller admirer dès le lendemain les curiosités zoologiques installées dans les douves et, après renseignements pris auprès des gardes, se dirigea vers le récent châtelet et sa grande salle de réception, son précieux sésame pour l'Anjou serré contre lui. Il se présenta :
Bonsoir, je me nomme Gigfy, nouvel ambassadeur d'Alençon en Anjou. Je souhaiterai rencontrer le chancelier ou son adjoint, ainsi que mon homologue, Dame Rani, je crois...
Et il attendit patiemment qu'on vienne s'occuper de lui tout en admirant les décorations de la salle.